lundi 12 décembre 2016

DIIV - Dopamine


DIIV

Un nouvel album de DIIV, cela n'arrive pas chaque année... Alors, quand l'occasion se présente, il faut en profiter ! Même si Is The Is Are est sorti depuis quelques mois déjà (février 2016), la fin d'année qui approche est toujours l'occasion de regarder dans le rétroviseur à la recherche des évènements musicaux marquants des douze derniers mois, et cet album en fait incontestablement partie. Une chose est certaine, il a fallu faire preuve de patience avant de voir arriver le successeur d'Oshin, petit joyau shoegaze aux guitares étincelantes et aux mélodies entêtantes sorti en juin 2012. C'est en réalité le temps que Zachary Cole Smith, leader et tête pensante du groupe, a pris pour chasser ses démons et retrouver l'inspiration.

En septembre 2013, l'artiste newyorkais était arrêté en compagnie de sa petite-amie chanteuse et mannequin Sky Ferreira à Saugerties en possession d'héroïne. Contraint de passer plusieurs jours en cure de désintoxication durant le mois de janvier, il sortait alors progressivement d'une longue et malsaine habitude commencée depuis la fac. Loin d'avoir attisé sa créativité, la drogue a plutôt eu tendance à assécher son inspiration et il lui a fallu réapprendre à écrire des chansons. Quelques années plus tard, l'ancien membre de Beach Fossils aux tenues vestimentaires typiques de Brooklyn se retrouvait avec une montagne de 300 chansons (!) dont 17 ont été choisies pour figurer sur le nouvel album Is The Is Are.

DIIV est donc bel et bien de retour. Le groupe du label Captured Tracks (qui compte également dans ses rangs un certain Mac Demarco) a gardé ses fondamentaux musicaux mais avec des textes marqués par toutes les expériences de son leader de 32 ans dont le visage juvénile (autrefois modèle pour Yves Saint Laurent) commence à porter les stigmates des excès. Le thème de la drogue est évidemment présent tout au long de ce disque même si c'est à travers le premier single Dopamine qu'il est incarné avec le plus de profondeur.


DIIV - Dopamine


Pour commencer, un petit mot sur le titre : la dopamine est la molécule qui se cache derrière tous nos comportements inavouables et nos désirs les plus secrets. Toute consommation excessive de drogue (cocaïne, héroïne ou même alcool) renforce la présence de dopamine dans le cerveau. Et cette libération massive de dopamine dans le cerveau procure du plaisir à la personne qui devient plus forte, plus courageuse, plus motivée... Le titre de cette chanson est donc sans équivoque par rapport au thème qui sera traité.

Les premières paroles évoquent les symptômes d'un drogué en manque : la transpiration ("I'm soaking"), la sensibilité au bruit ("Eardrums shaking") et la perte de poids après des années de consommation ("Years start weighin' me down"). Le terme "shot" renvoie quant à lui à l'injonction intraveineuse d'héroïne ("Shots ringing out"). Le narrateur est donc ici en attente de son "shot" et le temps commence à se faire long pour lui..

Arrive alors la délivrance : "Fixing now to mix the white and Brown". Le mot "fix" signifie dans le jargon une dose de drogue ou une préparation. Les termes "white" et "brown" donnent un peu plus d'indications quant à la drogue qui est consommée par la personne. "White" revoie à la cocaïne et "brown" à l'héroïne. Le mélange des deux, appelé "speedball", est particulièrement dangereux puisque ces substances ont des effets opposés : l'augmentation du rythme cardiaque pour la cocaïne et le ralentissement pour l'héroïne. Une overdose peut survenir lorsque les effets de la cocaïne disparaissent pour laisser pleinement la place à ceux de l'héroïne (qui mettent plus de temps à disparaître). Cette concoction a notamment été utilisée par des musiciens célèbres tels que le co-fondateur des Rolling Stones Keith Richards ou le chanteur de Depeche Mode Dave Gahan.       

Les paroles qui suivent ("Passing out, running in place") pourraient faire référence à l'état dans lequel la personne se trouve après la consommation de "speedball". "Passing out" ferait alors référence aux sensations qui résultent de la prise d'héroïne et "running place" à celles de la cocaïne. Le premier couplet se termine avec les vers "Got so high I finally felt like myself". Pour un drogué, la sobriété et le sentiment de manque sont tellement insoutenables qu'il ne se sent réellement lui-même que lorsqu'il a consommé sa drogue. Cela l'emmène dans une spirale infernale dont il est particulièrement difficile de se sortir.


Sky Ferreira et Zachary Cole Smith


La phrase "Buried deep in a heroin sleep", qui se trouve dans le deuxième couplet, est tirée d'un journal personnel de Kurt Cobain. On la retrouve également dans le film documentaire Montage of Heck écrit et réalisé par Brett Morgen dont le sujet est consacré à l'ancien leader de Nirvana. Un peu plus loin dans la chanson, les vers "You're the sun and I was your cloud" font référence, selon les dires de Zachary Cole Smith, à sa relation avec la chanteuse Sky Ferreira. Il s'agit d'un sentiment qu'il éprouvait régulièrement lorsqu'il était en couple avec elle. Il avait l'impression que lui et ses habitudes (la drogue notamment) l'empêchaient de la faire briller. Le nom de la chanteuse (Sky) rend cette métaphore doublement appropriée.             

Le pont de la chanson explore la mort prématurée des personnes dépendantes à la drogue. "Would you give your 81st year / For a glimpse of heaven, now and here ? / Would you give your 60th year / For a glimpse of heaven, now and here ?" etc. La question posée est la suivante : cela vaut-il vraiment la peine de sacrifier des années de vie pour un plaisir momentané et éphémère (la drogue) ici et maintenant ? En diminuant progressivement l'âge dans chacun des vers de ce pont musical (jusqu'à 34 ans), le chanteur insiste sur la terrible réalité concernant l'espérance de vie des drogués. De nombreux artistes dans le milieu du rock en ont fait la tragique expérience.

Cette chanson est donc à la fois le reflet de la propre expérience de Zachary Cole Smith ainsi qu'une réflexion personnelle sur la drogue. Il n'y a aucune volonté de la part de l'artiste de glorifier son usage mais, au contraire, de montrer à quel point tout cela est triste et pathétique. C'est un texte rédempteur tout autant qu'une mise en garde prononcée à l'adresse des jeunes fans de DIIV. D'un point de vue purement musical, Dopamine s'inscrit dans la lignée du précédent album du groupe. La chanson est rythmée, les guitares omniprésentes et les paroles de Zachary parfois à la limite de l'audible.




Dopamine

Shots ringing out, I'm soaking
Eardrums shaking, years start weighin' me down
Crawling out from a spiral down
Fixing now to mix the white and Brown
Passing out, running in place
You're the sun and I'm your cloud
Burning down, running in place
Got so high I finally felt like myself

Shots ringing out, I'm soaking
Eardrums shaking, years start weighin' me down
Buried deep in a heroin sleep
Floating deeper underground
Passing out, running in place
You're the sun and I was your cloud
Burning out, running in place
Got so high I finally felt like myself

Would you give your 81st year
For a glimpse of heaven, now and here ?
Would you give your 60th year
For a glimpse of heaven, now and here ?
Would you give your 45th year
For a glimpse of heaven, now and here ?
Would you give your 34th year
For a glimpse of heaven, now and here ?

Shots ringing out, I'm soaking
Eardrums shaking, years start weighin' me down
Crawling out from a spiral down
Fixing now to mix the white and Brown
Passing out, running in place
You're the sun and I'm your cloud
Burning down, running in place
Got so high I finally felt like myself

Shots ringing out, I'm soaking
Eardrums shaking, years start weighin' me down
Buried deep in a heroin sleep
Floating deeper underground
Passing out, running in place
You're the sun and I'm your cloud
Burning out, running in place
Got so high I finally felt like myself
    
 

1 commentaire:

  1. Super Groupe que j'adore depuis Oshin. il m'avait vraiment donner quelque chose de nouveau avec leurs longues intros et les guitares très présentes. Des chansons comme air conditioning, Druun et bien sûr Oshin ou Doused qui me donne envie de me lancer dans l'air guitare à chaque fois que je l'entends.

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